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Applaudissmeents du public

Stop. Allez on arrête. Pause !

Ben oui évidemment tout ça a un prix. Fort mérité certes, mais aussi très concret.

En fait, y’en avait qu’une pour cinq.
Le producteur a bien négocié.

Moi j’ai eu la mienne pour 1000 euros. 
Pas donné hein ?

Du Cristal de roche, une fine feuille dorée à l’or fin, une belle boite en cuir.

Bon ça c’est fait.

Il ramène la silhouette et commence à se déshabiller.

C’est très Brechtien, ce que je fais là !

Il commence à se déshabiller derrière la silhouette.

Comment on fait, pour avoir une prix d’interprétation ? On bosse. Beaucoup de travail. C’est pas simple d’aborder un personnage. Il y a des tas d’écoles, en plus. On s’y perdrait. Merde ! des pièces de monnaie tombent. Tiens, le théâtre pauvre ! C’est Grotowski, ça ! Alors lui, c’est la « via négativa ». Il pousse les acteurs à l’extrême pour diminuer ses résistances intérieures. Il appelle ça la translumination. Moi j’appelle ça la manipulation. Mais bon, je ne suis pas un bon exemple.

Artaud, lui, c’est de la folie pure. Pour lui, le théâtre c’est de la lave dans le désastre d’un volcan. Retrouver la source des conflits. Nous ne sommes pas libres et le ciel peut encore nous tomber sur la tête. Il passe la tête sur l’épaule de la silhouette, vous trouvez pas que je peux ressembler à Artaud ? A nouveau derrière la silhouette j’aime pas trop qu’on me dise ça…

Si vous êtes plus branchés cinéma, vous avez la fameuse Méthode. Actor Studio. Strasberg, Stanislavski. Sobre. Naturalisme. Mémoire sensorielle, le passé du personnage, le geste psychologique. A l’américaine. C’est pas par antiaméricanisme primaire mais je crois que je suis le contre exemple de l’Actor Studio. Je hais la psychologie dans le jeu. Je déteste. Ça dégouline, ça renifle… berck ! Souvent on me demande si je me prépare longtemps à l’avance, si je suis allé dans un asile pour jouer un fou. Dans une caserne pour jouer un soldat, dans un magasin bio pour jouer un con (non, je déconne !) Comme je suis poli je dis oui. Je vais même jusqu’à raconter que j’ai perdu 15 kg pour un rôle. Les gens adorent ! C’est un peu comme le guide qui dit qu’il y a 1734 marches pour arriver au sommet de la tour. Rien à foutre ! C’est haut et chiant, c’est tout ! Non, le régime, je l’ai fait parce que j’étais trop gras, que j’avais une gueule qui virait ronde, sans intérêt, façon Hollande et que je commençais à faire du mauvais cholestérol, façon Jacques Weber.

Sinon, au siècle dernier, en France, on aimait beaucoup Brecht et sa distanciation. Rompre avec l’illusion du théâtre. Forcer le regard critique du spectateur. Bon, c’est un peu dépassé tout ça. Etre acteur… il n’y a pas de recettes, pas de méthode. Chacun sa merde ! L’acteur mis à nu, il ne reste qu’un homme, celui que cherche le spectateur pour se reconnaître ou simplement faire le voyeur. 

                                                                                                                                                                                                                                                         Bernard Blancan

Renaud Cojo, Bernard Blancan
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